Pour la première fois depuis 8 ans, les financements dédiés à la lutte contre la tuberculose sont en baisse. Présente presque exclusivement dans les pays du Sud, la maladie souffre d’un manque de mobilisation des pays développés, à l’inverse du sida. Des financements en berne, c’est le constat tiré lors d’une rencontre autour de la tuberculose organisée au Sénat à la veille de la conférence internationale de l’Union contre les maladies respiratoires. Environ 8,7 millions de personnes à travers le monde ont été nouvellement diagnostiquées en 2011, et 1,4 million sont décédées, selon les chiffres de l’ONU. Pourtant, les financements dédiés à la recherche et au développement (R&D) pour la tuberculose ont diminué de 4,6 % en 2012 par rapport à 2011 pour atteindre 627,4 millions de dollars (455,6 millions d’euros). Une première, selon le rapport annuel publié par le think tank « Halte à la tuberculose ». Pour Lucica Ditiu, sa directrice exécutive du partenariat, il est urgent d’augmenter de manière drastique les financements en faveur de la lutte contre la tuberculose. « Il y a une véritable déconnexion entre la gravité et l’ampleur de cette maladie et les moyens alloués pour la combattre », regrette-t-elle. Manque de mobilisation des financements Problème, cette maladie infectieuse touche les pays les plus pauvres, alors qu’elle a presque totalement disparu des pays développés, à l’inverse du sida qui touche l’ensemble des économies. Aujourd’hui, 22 pays seulement supportent 80 % de la charge mondiale de la tuberculose. « Jusque dans les années 50, la tuberculose était un problème de santé publique. Les investissements de l’industrie pharmaceutiques étaient donc présents. Aujourd’hui, c’est une maladie de la pauvreté », signale Mark Harrington, directeur exécutif du Groupe d’action pour le Traitement (Treatment Action Group). « Résultat : nous disposons des mêmes outils pour lutter contre la tuberculose qu’il y a 40 ans ! » s’insurge Lucica Ditiu. « Le budget mondial de R&D pour le sida est d’environ 6 milliards de dollars (4,4 milliards d’euros) par an. Pour chaque dollar dépensé dans la recherche sur cette maladie, seuls 10 cents (7 centimes d’euros) sont consacrés à la recherche sur la tuberculose », détaille Mark Harrington, directeur exécutif du Groupe d’action pour le Traitement (Treatment Action Group). Une iniquité qui pourrait bien mettre en péril les progrès accomplis dans la lutte contre cette maladie infectieuse. « Chaque année, nous enregistrons en moyenne 2 % de baisse des cas de tuberculose dans le monde. À ce rythme, il faudrait 180 ans pour que les pays les plus touchés par cette maladie atteignent les niveaux enregistrés dans les pays développés » souligne-t-elle. Pour l’ONU, cette baisse, bien que lente, devrait permettre d’atteindre « la cible OMD qui consiste à arrêter la progression et inverser l’incidence de la tuberculose », note le rapport 2013 de l’ONU sur les objectifs du Millénaire pour le développement. L’objectif de réduire de moitié les taux de décès de 1990 d’ici à fin 2015 « pourrait être atteinte à l’échelle mondiale et dans plusieurs régions » relève l’organisation internationale. Un partage difficile avec la lutte contre le sida La lutte contre la tuberculose, financée par le Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme reste tributaire d’une répartition délicate entre les trois maladies. « Il est indéniable que la lutte contre le sida a tiré les financements du fonds vers le haut. Mais la répartition entre les différentes maladies infectieuses demeure difficile » relève Philippe Meunier, ambassadeur pour les maladies transmissibles au Quai d’Orsay. Aujourd’hui, le sida accapare environ 50 % des ressources du Fonds mondial et la tuberculose 18 %. « Il faut fonctionner davantage grâce au cofinancement de la lutte contre ces deux maladies », propose Philippe Meunier. Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), 13 % des personnes tuberculeuses étaient séropositives en 2011. Reconstitution du Fonds mondial Hasard du calendrier, la reconstitution du Fonds mondial de lutte doit avoir lieu avant la fin de l’année 2013. Reste à savoir si l’austérité budgétaire aura raison de l’investissement des donateurs. Selon les estimations de l’OMS et du Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme, il faudrait 1,6 milliard de dollars (1,2 milliard d’euros) supplémentaires pour combler le déficit de financement pour la période 2014-2016 de la lutte contre la tuberculose. Pour sa part, la France va doter le Fonds mondial de 360 millions d’euros annuels pour la période2014-2016, soit un maintien de sa contribution par rapport à la période précédente (2011-2013). Autre pays européen ayant d’ores et déjà annoncé sa contribution, le Royaume-Uni compte augmenter sa participation à 1,18 milliard d’euros sur 3 ans, ce qui en fait le premier pays européen donateur. Cécile Barbière
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